21 décembre 2010

(24/n)

Dos courbé, tête baissée, cheveux en désordre, ancienne veste lourde, pantalon tacheté de café, odeur de sueur mêlée de tabac, Saîd ne put croire ce qui lui était arrivé cette journée…Ce fut la treizième fois qu’il soit renvoyé de son travail !

Il faisait mauvais temps, le vent soufflait très fort, le ciel était nuageux d’un gris foncé, la nuit commençait à tomber, comme si le climat reflétait l’état de son âme si perturbée. Il marchait à lents pas, ne voulant pas arriver à la maison de peur de choquer sa famille par la mauvaise nouvelle…En marchant, il pensait à mille idées mais ne pouvant se concentrer sur aucune d’elle. Il acheta alors un paquet de cigarettes et se mit à fumer les cigarettes l’une après l’autre jusqu’à ce qu’il se trouva devant la porte de sa maison. Son cœur se mit à battre fort, il pensa à faire un demi-tour et aller chercher ses amis au café du quartier, mais il se sentait incapable de rencontrer quiconque. Il ouvrit alors la porte et entra silencieusement, il se rendit compte qu’il n’y avait personne à la maison. Si démoralisé, il se jeta d’un coup sur son lit.

Ne pouvant se résigner au sommeil, il décida de revenir au passé pour revoir sa vie : une vie pleine d’échecs, presque privée de bonheur et joie. Aucun projet réussi sauf celui du mariage, peut-être c’était grâce à sa femme si optimiste et si patiente face à ses fureurs et ses blâmes fréquents…Il se rappela de son premier emploi, il était ouvrier dans une petite briqueterie. Il était très paresseux et fainéant, il n’aimait personne et rien, il blâmait tout ce qui l’entourait, il croyait qu’il n’avait pas de chance dans cette vie pleine de problèmes... En revenant à cette époque, il se souvint d’un collègue qui travaillait avec lui dans le même chantier, c’était un jeune homme remarquable, il était très actif et travaillait avec enthousiasme, il était toujours propre et souriant, il avait de grandes ambitions et disait toujours à Saîd que son rêve était de créer sa propre entreprise de transport de marchandises, ce dernier se moquait évidemment de lui…

Sa femme coupa son fil de réflexion en entrant, elle avait en main un panier plein de légumes, de fruits et de poulets, elle était joyeuse, mais à la vue de l’état de son mari elle fut surprise et lui demanda ce qu’il avait, il répondit avec amertume et résignation : « Encore une fois, j’ai perdu mon emploi ». Sa femme sourit et lui dit calmement : « Ne t’en fais pas chéri, Allah te donnera un nouveau travail comme Il te l’avait donné les fois précédentes. Je te propose d’aller chez le coiffeur puis passer au hammam pour prendre un bain chaud, je vais te préparer ta sacoche. A l’occasion, notre fils Ahmed a réussi le concours qu’il a passé, il sera embauché le mois prochain. Nous allons fêter cela ensemble ce soir ! »

* * * * * * *

A son retour du hammam, Saîd sentit comme s’il avait nettoyé son âme des idées noires qui l’habitaient et comme s’il allait commencer une nouvelle page de sa vie. Quand il s’assit devant la télévision le téléphone sonna, sa femme lui dit que c’était un Monsieur s’appelant Hassan Hilali qui le demandait. Saîd répondit, il fut surpris quand il se rendit compte que c’était son ancien collègue qui avait son propre projet et qui avait besoin d’un chauffeur de camion…

1 commentaire:

  1. Toujours briller
    je vois pas que c'est un blog mais plutôt une musée, en lisant vos écritures, nous voyons l'histoire de Saîd passe devant nos yeux, comme si on voit un film (pas les films marocains), on sentit que nous somme une partie de cette histoire.
    enfin ce que que j'ai beaucoup aimé c'est que vous avez donner l'exemple de la vraie femme marocaine <>
    j'ai beaucoup aimé aussi votre précision dans l'expression.
    Hommage à l'écrivaine

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